Que risquez-vous à ne pas déconnecter du travail pendant les vacances ?
Par incapacité à lâcher prise, le sentiment d’être indispensable ou par peur de perdre votre poste, vous êtes de plus en plus à ne pas parvenir à déconnecter du boulot pendant les vacances. Des experts font le point sur les dangers de ce comportement.
Les cadres et les travailleurs indépendants sont les plus touchés
Plus on a de responsabilités et plus on a de mal à se déconnecter de son travail pendant ses congés. Ainsi, nombre de cadres se fixent des plages horaires journalières pour communiquer avec leur entreprise et traiter leurs informations. Le plus souvent une heure ou deux. Les travailleurs indépendants sont eux aussi touchés par cette incapacité à lâcher prise. Étant responsables de leur propre activité, ils mettent encore moins de limites entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle. Pourtant, pour la psychothérapeute Nathalie Prussia-Colin, « il faut absolument prendre des vacances en se déconnectant complètement pour pouvoir mieux revenir au travail. » Au risque de perdre en efficacité ou pire, de faire un burn out !
"On peut, par exemple, développer un sentiment de lassitude, d’être pris au piège de quelque chose qu’on ne comprend plus, de perte de sens."
L’addiction à l’information : la faute aux smartphones
Il y a toujours eu des salariés sous pression, mais ce qui a changé, c’est l’apparition des smartphones et tablettes numériques qui permettent d’être joignable à tout instant et de travailler en tout lieu. Selon une étude réalisée par Google et Ipsos en juin dernier, le taux de pénétration des smartphones dans la population française a atteint les 42 % début 2013, contre 38 % au premier trimestre 2012 et 27 % au premier trimestre 2011 ! Des petites merveilles de technologie qui rendent la déconnection du salarié plus difficile.
« En vacances, le fait de ne pas pouvoir recevoir d’informations est très frustrant pour certains salariés, analyse Maryvonne Labeille, vice-présidente du Syntec conseil en recrutement. Ils refusent par exemple de loger dans un hôtel où la réception est mauvaise et où il n’y a pas de connexion internet… ». Ce sont clairement des situations d’addiction vis-à-vis de l’information et des outils qui permettent d’y accéder. Cette dépendance est d’autant plus perverse, que le téléphone personnel et le terminal professionnel, sont très souvent un seul et même appareil. Dans ces conditions, il est parfois difficile de faire la part des choses entre ce qui relève de la vie privée et du travail.
Des risques psychiques et physiques
Le cerveau a besoin de vacances et de repos total de temps à autre. Ce qui implique de se déconnecter de son travail. Sinon, les risques de faire naître des symptômes psychiques ou physiques sont réels. « On peut, par exemple, développer un sentiment de lassitude, d’être pris au piège de quelque chose qu’on ne comprend plus, de perte de sens, prévient Sylvaine Pascual, coach spécialiste en relations humaines. » Cette perte de repères peut aussi se doubler de sautes d’humeur, d’agacements chroniques et d’angoisses. La fatigue provoque en outre le sentiment de devoir s’investir encore plus et de faire d’avantage d’efforts pour un résultat équivalent. « Il s’agit d’un processus long, mais qui explique en partie l’augmentation exponentielle des burn out depuis quelques années, » analyse Sylvaine Pascual. Un danger à ne pas prendre à la légère.
Des solutions existent
Pour éviter la perte d’efficacité, ou pire le burn out, la première chose à faire, c’est bien sûr d’éteindre son smartphone ! Mais c’est malheureusement plus facile à dire qu’à faire. Face à ce défi, l’idéal c’est quand la hiérarchie aide le travailleur. « L’entreprise ne doit contacter son salarié que pour des situations vraiment exceptionnelles, » plaide Maryvonne Labeille.
Si vous avez du mal à déconnecter, il peut être judicieux de caler ses congés sur les périodes de faible activité de votre société.
Dans les autres bonnes pratiques pour partir de son bureau l’esprit tranquille, on tente de traiter le maximum de dossiers possibles avant le jour J et, surtout, on apprend à déléguer, à faire confiance à ses collègues qui restent sur place, en leur confiant ses dossiers urgents. Au final, il faut accepter le fait qu’on n’est pas indispensable à la bonne marche de l’entreprise, et qu’on retrouvera son poste même si on n’a pas été sur la brèche pendant toutes ses vacances.
Joignable ou pas en vacances : les obligations légales
Selon Vanessa Walch, avocate au barreau de Seine-Saint-Denis, le salarié n’a pas l’obligation d’être joignable pendant ses vacances. Cependant, il doit veiller à ce que ses dossiers restent accessibles à ses collègues pendant son absence. Il est aussi conseillé qu’il fasse à son employeur un récapitulatif de ses dossiers en cours avant de partir. Un salarié peut exceptionnellement être joignable si son employeur justifie un intérêt supérieur de l’entreprise et qu’il n’a pas les ressources en interne pour faire face à ces difficultés. Sachant que plus le salarié est haut placé dans la hiérarchie, et plus il devra rester joignable. En fait, tout est affaire de proportionnalité entre la place du salarié dans la hiérarchie et la difficulté rencontrée.
Toutefois, l’employeur a une obligation concernant la santé de son employé. Si celui-ci est harcelé de mails et d’appels téléphoniques, le soir, le week-end et pendant ses vacances, cela peut très bien conduire à un burn out. Le salarié pourrait alors se retourner contre son employeur.