Faut-il être soi-même en entretien d’embauche ?
D'un côté, il y a les candidats qui pensent devoir s’inventer un personnage pour briller en entretien d’embauche et, de l’autre, les recruteurs qui réclament de la transparence... Pour vous aider à adopter l’attitude la plus efficace, on a été demander à plusieurs experts ce que voulait vraiment dire "être soi-même" face à un employeur.
1 Ne pas s’inventer un personnage
« Si les candidats étaient vraiment eux-mêmes, cela se saurait ! » On doit la formule à Christophe du Pontavice. Mais le directeur du réseau immobilier Efficity dresse ce constat sans amertume. « L’entretien d’embauche est un exercice de style et cette question, d’être soi-même ou pas, pose la limite entre sa personne privée et sa personnalité publique », résume ce recruteur. Malgré tout, il invite les candidats à ne pas s’inventer un personnage. « Car si on fait trop semblant, cela se paiera forcément après. » Pour Mickaël Cabrol, le manque de naturel est même le meilleur moyen d’envoyer son CV à la poubelle. « 93 % de la communication est non verbale et un recruteur aguerri saura décrypter les émotions du candidat, rappelle le fondateur d’EasyRecrue, spécialiste des entretiens vidéo. Des émotions comme la joie, la surprise, la tristesse, le dégoût, le stress ou la confusion sont normales. À condition, simplement, qu’elles ne soient pas en contradiction avec le discours du candidat. Dans ce cas, on se dira qu’il n’est pas clair. »
"L’enjeu, pour savoir parler de soi, est de réussir à placer le curseur entre authenticité et contrôle."
2 Ne pas être "comme d’habitude"
Yves Gautier parle d’expérience. « L'autre jour, j'ai reçu quelqu'un au chômage depuis 15 mois qui pensait justement être trop naturel en entretien, témoigne ce coach spécialisé dans l’accompagnement et la recherche d’emploi. Mais quand on dit aux candidats de rester eux-mêmes, beaucoup entendent qu’ils doivent être "comme d’habitude". » Or cet expert invite plutôt ses clients à tester de nouvelles approches. « Il ne s'agit là pas de jouer un personnage, mais de se donner un espace de liberté pour essayer d'autres choses, par exemple dans sa façon de se présenter en entretien. On peut oublier la présentation chronologique pour ne parler que de ses compétences. On peut aussi essayer de mettre en avant une réalisation particulièrement probante. Ne pas être soi-même en sortant de sa zone de confort, mais en gardant son authenticité. »
3 Surveiller sa posture
Malgré tout, il faudra aussi composer avec certains codes. Pour augmenter ses chances, Didier Pitelet recommande ainsi de surveiller sa posture. « Pour projeter une image plus professionnelle, le candidat pourra s’asseoir un peu sur le bord de la chaise plutôt qu’au fond, explique le président de la société de conseil en réputation Moons’ Factory. De même, il faut regarder son interlocuteur dans les yeux et sourire. C’est un bon moyen de se tenir droit et d’avoir une position plus engageante envers le recruteur. » Pour le consultant, l’enjeu est de soigner son image… sans trop tricher. « De même, à la fin du rendez-vous, on peut serrer la main de son interlocuteur une ou deux secondes de plus. Cette technique n’est pas très naturelle mais imprime davantage la relation. »
4 Être généreux avec ses émotions
« L’enjeu, pour savoir parler de soi, est de réussir à placer le curseur entre authenticité et contrôle », observe Émilie Devienne. Cette coach, qui enseigne également à l’ESC d’ Amiens, conseille à ses étudiants d’éviter d'essayer de se conformer à un moule. « Pour être soi-même, un minimum de travail sur soi s’impose. Il faut déterminer quelles informations on est prêt à donner ou pas. Mais en même temps, il ne faut pas être dupe : à compétences égales, c’est sur la personnalité que le choix va se jouer. Or, à force de se contrôler pendant l’exercice, trop de personnalités ne se révèlent pas. Il faut un peu de lâcher prise avec ses émotions. »
5 Savoir dire certaines choses
Car enfin, être soi-même ne signifie pas être transparent. « Certains recruteurs et managers voudront en savoir beaucoup sur le candidat, observe Emmanuel Stanislas, le fondateur du cabinet Clémentine. C’est une demande légitime, mais le candidat n’est absolument pas obligé de tout dire. Cependant, il faut éviter les malentendus. Si vous ne supportez pas certaines ambiances de travail ou si vous avez une façon particulière de travailler, mieux vaut le dire tout de suite plutôt que de laisser son futur manager le découvrir pendant la période d’essai. Il n’y a rien de pire que l’implicite pour gâcher un recrutement. Il faut dire certaines choses. » Mais cet expert conçoit aussi que l’argument vaut pour les deux parties. « Lors d’un entretien avec un éventuel futur n+1, un candidat peut aussi poser certaines questions. Et le manager a tout intérêt à répondre le plus honnêtement possible. Et à rester lui-même lui aussi… »